Conseils de lecture
Générosité
Ce magnifique livre est d'une générosité incroyable, publié à l'occasion des quarante ans de carrière d'Etienne Daho, initiateur et révélateur de la Pop française, venue chatouiller nos oreilles au milieu des années 80. Sylvie Coma, journaliste et surtout amie d'adolescence offre une narration détaillée et intime, d'une grande sincérité, sans tricherie, accompagnée de centaines de documents et de photographies issues de la collection personnelle de l'artiste. On y découvre sa trajectoire inédite, ce mélange d'élégance et de pudeur caractéristiques, sa détermination farouche à parvenir là où il souhaite aller, toujours singulier à se renouveler et à surprendre. C'est une rencontre fabuleuse avec Etienne Daho et ses intuitions, son satori, son désir intense de créer, sans cesse à l'affût de sons, de courants émergents, de découvertes, de nouvelles amitiés. Ouvrez vite cet album secret et laissez-vous porter par ce grand voyage musical !
Une vérité étouffée
De Cherbourg à Karachi, ce captivant thriller géopolitique savamment orchestré conduit hors des sentiers battus sur le chemin d'une vérité par trop étouffée. Rythmé, inventif, original, le dépaysement est absolu.
Jeune journaliste local du Cotentin, Jef Kerral est marqué depuis l'enfance par l'attentat de Karachi qui, en 2002, a coûté la vie à 14 personnes dont 11 techniciens français de la Direction des construction navales qui travaillaient à la mise au point d'un sous-marin acheté par le gouvernement pakistanais. Ce terrible événement a provoqué une brouille incompréhensible entre son père, Claude, collègue de ces victimes et son meilleur ami, Marc, rescapé de l'attentat que Jef admire. Alors que les commémorations des 20 ans du drame se profilent, avec leur cortège d'officiels et d'hypocrisies, Jef est lassé de couvrir les fêtes locales du cidre et plus encore de l'étouffement de la vérité qui asphyxie les victimes et empoisonne les vies de tous. Il se rend à Karachi sur la piste pakistanaise étonnamment négligée par les enquêteurs à la recherche de Shaheen Ghazali, un officier ingénieur de la marine pakistanaise, homme loyal et droit qui se bat depuis 20 ans pour que la vérité éclate mais qui ne donne plus signe de vie. Dans l'effervescence et le labyrinthe de Karachi, où le danger guette et menace à chaque coin de rue, Jef trouve le soutien de Sara, jeune lieutenante de la marine pakistanaise. Mais le chemin de la vérité peut-il sortir des sentiers obscurs de Karachi ? Olivier Truc mène un thriller géopolitique haletant aux personnages attachants. Comme Jef, ce localier devenant grand reporter, il va là où les autres ne vont pas, déplace le regard, ouvre les yeux sur un système infernal de pressions et de corruptions face auquel des hommes et des femmes courageuses n'ont parfois, entre révolte et résignation, d'autre refuge que la poésie pour résister et pour échappatoire les corridors et arrière-cours d'improbables et hallucinantes boutiques de livres, lieux de scènes fascinantes.
De toute beauté
À travers le personnage de Vadim, jeune parisien d'une dizaine d'années placé dans les années 40 dans une famille d'accueil d'un village de montagne pour y être protégé, ce magnifique roman est celui de toutes les sensations, de tous les éveils au monde, de tous les apprentissages et découvertes, celui de la plus belle enfance, si fragile et si menacée par la violence des hommes et la folie de l'histoire. Mais à l'abri de cette montagne belle, majestueuse, impressionnante et de ses habitants, Vadim s'ouvre aux autres et à la vie, il fait confiance au monde, traversé par l'intensité des couleurs, des odeurs et des sensations. Et c'est l'une des très grandes beautés de ce roman que de nous rappeler qu'il doit toujours y avoir une place pour accueillir et protéger la beauté de l'enfance dans la beauté du monde, que l'une et l'autre sont liées. Valentine Goby, à son sommet, nous fait entrer dans cette plénitude.
Si juste, si poignant
En évoquant le figure de son oncle dans les années 80, jeune noceur devenu dépendant à l'héroïne avant de contracter le SIDA, Anthony Passeron dresse le portrait bouleversant d'une famille commerçante de l'arrière-pays niçois, confrontée à l'impensable d'une maladie inconnue alors. Avec délicatesse et d'un regard toujours attentionné, il interroge par des scènes, des mots, des situations et des images soigneusement choisies, les silences et les non-dits. Il met en miroir de l'histoire familiale, la course poursuite des médecins et des chercheurs pour lutter contre cette nouvelle maladie. Jamais sordide, ce premier roman est juste et poignant. Il porte ses personnages comme on porte sur ses épaules un être aimé et fragile pour qu'il soit vu, enfin. Par là même, il montre à quel point toutes les strates de la société française ont été touchées par le SIDA, y compris dans le monde rural.
Quatre vibrants destins
Après "Le chagrin des vivants", "La salle de bal" et "Nos espérances", ce nouveau roman d'Anna Hope surprend par son audacieuse construction. Il confirme son grand talent stylistique et sa capacité à nous entrainer dans des destins romanesques. Magicienne, elle multiplie ce plaisir de lecture par quatre en nous faisant entrer dans quatre histoires passionnantes qui se déroulent toutes autour d'un même lieu, le Rocher blanc situé au large du Mexique, à travers quatre personnages pris dans quatre époques différentes, du 18e siècle à nos jours.
Chaque époque, chaque histoire et chaque personnage entre en résonance avec les autres comme si une odyssée humaine et la marche du monde se dessinaient sous ce rocher blanc liant les hommes entre eux à travers les siècles. Avec une intensité dramatique soutenue, le destin de chacun se joue à cet endroit. Sous l'influence d'une nature belle et puissante, permanente et comme originelle, respectée par les uns, bafouée par les autres, tous sont bousculés et se métamorphosent pour aller chercher au fond d'eux ce qu'il y a de plus vibrant quitte à frôler la folie, la névrose ou la mort. Un chemin risqué et intranquille pour retrouver une liberté perdue mais qui demeure le plus beau qui soit pour se sentir vivant. Comme ce chemin littéraire que trace Anna Hope en se réinventant avec ce beau, risqué, intranquille et vivant Rocher blanc.