Annie Ernaux, prix Nobel de littérature

Prix Nobel de littérature 2022, Annie Ernaux ajoute son nom et son œuvre à la plus belle, la plus rare et la plus prestigieuse des compagnies littéraires.
Elle rejoint ainsi au firmament de la littérature mondiale, Mistral, Kipling, Lagerlöf, Yeats, Bergson, Mann, Pirandello, Hesse, Gide, Faulkner, Mauriac, Hemingway, Camus, Pasternak, Saint-John Perse, Steinbeck, Sartre, Beckett, Soljenitsyne, Neruda, Böll, Bellow, Bashevis Singer, García Márquez, Claude Simon, Mahfouz, Paz, Gordimer, Morrison, Saramago, Gao Xingjian, Naipaul, Kertész, Coetzee, Jelinek, Pinter, Pamuk, Lessing, Le Clézio, Vargas Llosa, Munro, Modiano, Alexievitch, Ishiguro, Tokarczuk, Handke et tant d'autres d'une liste vertigineuse ! Pour prendre la mesure et l'ampleur considérable de ce prix Nobel de littérature, découvrez cette inégalable et magnifique compagnie !

«Écrire n'est pas pour moi un substitut de l'amour, mais quelque chose de plus que l'amour ou que la vie.» 15 janvier 1963 «Cette sensation terrible, toujours, d'être à la recherche de l'écriture "inconnue", comme cela m'arrive de désirer une nourriture inconnue. Et je vois le temps passer, nécessité d'écrire contre le temps, la vieillesse.» 3 août 1990 «Écrire la vie. Non pas ma vie, ni sa vie, ni même une vie. La vie, avec ses contenus qui sont les mêmes pour tous mais que l'on éprouve de façon individuelle : le corps, l'éducation, l'appartenance et la condition sexuelles, la trajectoire sociale, l'existence des autres, la maladie, le deuil. Je n'ai pas cherché à m'écrire, à faire œuvre de ma vie : je me suis servie d'elle, des événements, généralement ordinaires, qui l'ont traversée, des situations et des sentiments qu'il m'a été donné de connaître, comme d'une matière à explorer pour saisir et mettre au jour quelque chose de l'ordre d'une vérité sensible.» juillet 2011
Ce volume contient, notamment : Les armoires vides - La honte - L’événement - La femme gelée - La place - Journal du dehors - Une femme - «Je ne suis pas sortie de ma nuit» - Passion simple - Se perdre - L’occupation - Les années
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6,30

«Enfant, quand je m'efforçais de m'exprimer dans un langage châtié, j'avais l'impression de me jeter dans le vide.Une de mes frayeurs imaginaires, avoir un père instituteur qui m'aurait obligée à bien parler sans arrêt en détachant les mots. On parlait avec toute la bouche.Puisque la maîtresse me "reprenait", plus tard j'ai voulu reprendre mon père, lui annoncer que "se parterrer" ou "quart moins d'onze heures" n'existaient pas. Il est entré dans une violente colère. Une autre fois : "Comment voulez-vous que je ne me fasse pas reprendre, si vous parlez mal tout le temps !" Je pleurais. Il était malheureux. Tout ce qui touche au langage est dans mon souvenir motif de rancœur et de chicanes douloureuses, bien plus que l'argent.»


8,90

«En somme, je vais parler de ceux que j'aimais», écrit Albert Camus dans une note pour Le premier homme. Le projet de ce roman auquel il travaillait au moment de sa mort était ambitieux. Il avait dit un jour que les écrivains «gardent l'espoir de retrouver les secrets d'un art universel qui, à force d'humilité et de maîtrise, ressusciterait enfin les personnages dans leur chair et dans leur durée».Il avait jeté les bases de ce qui serait le récit de l'enfance de son «premier homme». Cette rédaction initiale a un caractère autobiographique qui aurait sûrement disparu dans la version définitive du roman. Mais c'est justement ce côté autobiographique qui est précieux aujourd'hui.Après avoir lu ces pages, on voit apparaître les racines de ce qui fera la personnalité de Camus, sa sensibilité, la genèse de sa pensée, les raisons de son engagement. Pourquoi, toute sa vie, il aura voulu parler au nom de ceux à qui la parole est refusée.


8,30

- Naturellement, vous savez ce que c'est, Rieux ?
- J'attends le résultat des analyses.
- Moi, je le sais. Et je n'ai pas besoin d'analyses. J'ai fait une partie de ma carrière en Chine, et j'ai vu quelques cas à Paris, il y a une vingtaine d'années. Seulement, on n'a pas osé leur donner un nom, sur le moment... Et puis, comme disait un confrère : «C'est impossible, tout le monde sait qu'elle a disparu de l'Occident.» Oui, tout le monde le savait, sauf les morts. Allons, Rieux, vous savez aussi bien que moi ce que c'est...
- Oui, Castel, dit-il, c'est à peine croyable. Mais il semble bien que ce soit la peste.

Oran, dans les années 1940. Le docteur Rieux est témoin de l'apparition de rats dans les rues. La ville est mise en quarantaine, pour ne pas que la peste se propage. La chronique de cette épidémie et des comportements qu'elle suscite est relatée. Une représentation transposée de l'occupation allemande en France et de la Résistance.


7,80

«J'ignorerai toujours à quoi elle passait ses journées, où elle se cachait, en compagnie de qui elle se trouvait pendant les mois d'hiver de sa première fugue et au cours des quelques semaines de printemps où elle s'est échappée à nouveau. C'est là son secret. Un pauvre et précieux secret que les bourreaux, les ordonnances, les autorités dites d'occupation, le Dépôt, les casernes, les camps, l'Histoire, le temps - tout ce qui vous souille et vous détruit - n'auront pas pu lui voler.»