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Le , Espace Les Vikings

L'événement est exceptionnel et s'annonce passionnant ! Le samedi 5 octobre à Yvetot, Annie Ernaux, prix Nobel de littérature 2022, sera entourée d'historiennes et d'historiens parmi lesquels Michelle Perrot et Ivan Jablonka.

Cette rencontre remarquable est une initiative proposée et organisée par Carole Christen (professeure des Universités, Université Le Havre Normandie) et Anne-Marie Cheny (maîtresse de conférences, Université de Rouen Normandie), en partenariat avec la ville d'Yvetot.

Pourquoi organiser une rencontre entre l’écrivaine, prix Nobel de littérature (2022), Annie Ernaux et des historiennes et historiens à Yvetot ? Que peuvent-ils se dire ? Que peut apporter ce moment au public ?
L’œuvre d’Annie Ernaux (notamment "Les Années") permet de comprendre son rapport au temps, au passé, aux événements de l’histoire et à la mémoire. Ce moment d'échange entre Annie Ernaux, des historiens, des historiennes et le public permettra de revivre 60 ans d'années, en partie commune, et de réfléchir sur ce lien si riche entre littérature (du réel) et histoire.

Annie Ernaux, invitée d'honneur, sera entourée de :
Jean-François Chanet (professeur des Universités, Institut d’Études politiques de Paris, ancien Recteur)
Anne-Marie Cheny (maîtresse de conférences, Université de Rouen Normandie)
Carole Christen (professeure des Universités, Université Le Havre Normandie)
Ivan Jablonka (professeur des Universités, Université Paris Sorbonne Nord)
Emmanuelle Loyer (professeure des Universités, Institut d’Études politiques de Paris)
Michelle Perrot (professeure des Universités émérite, Université Paris Diderot)

Gratuit et sur réservation sur le site Internet de la salle des Vikings en suivant ce lien

La librairie la buissonnière, partenaire de l'événement, proposera à la vente les ouvrages des autrices et des auteurs.

Pourquoi organiser cette rencontre à Yvetot en Annie Ernaux et des historiennes et historiens ? Annie Ernaux, née à Lillebonne en septembre 1940, a vécu continûment de cinq à dix-huit ans puis de façon irrégulière durant ses études à Rouen jusqu’à vingt-quatre ans, dans cette petite ville normande, située sur le plateau du pays de Caux. Yvetot occupe une place primordiale dans son œuvre : « le lieu de l’expérimentation, le matériau fourni par la mémoire mais utilisé, transformé par l’écriture en quelque chose de général » ("Retour à Yvetot", 2012).
Cette rencontre à Yvetot sera l’occasion de discuter sur l’usage du temps historique et des archives familiales dans les récits d’Annie Ernaux. Il s’agira également de réfléchir sur l’utilisation de cette œuvre par les historiennes et historiens comme source pour écrire l’histoire.
"Les Années" est le fruit d’un demi-siècle de maturation intellectuelle et de conservation d’une documentation composite : archives privées textuelles (agendas, carnet d’adresses, journal intime), visuelles (cartes postales, affiches publicitaires, photographies de l’album familial), sonores (les expressions et voix familiales, les chansons qu’elle écoutait), et de recherches documentaires nourries de lectures en sciences sociales. Ces documents constituent le matériau premier de ce « roman » pensé comme « total ».

Anne-Marie Cheny questionnera ce matériau composite : comment passer de la conservation à l’écriture ? Est-ce que l’écriture littéraire rend cette étape singulière et différente de l’écriture historienne ?

Michelle Perrot reviendra sur cette autobiographie personnelle et collective dans laquelle Annie Ernaux, témoin et historienne, tente, à travers sa propre expérience, de saisir les changements dans la condition des femmes, en cette période cruciale (1950/2000) qui les a vues accéder à la maîtrise de la contraception sans pourtant les libérer totalement et leur donner la parole.

Ivan Jablonka s’intéressera à ce qu’il appelle la « révolution Ernaux ». Irriguée par les sciences sociales, la littérature d’Annie Ernaux les renouvelle en retour, par ses thèmes et sa narration : histoire des femmes et des classes populaires, sociologie des émotions, géographie du quotidien. L’intime et le collectif se superposent : le moi chez Ernaux est révélateur de notre historicité et de nos déterminations sociales.

Emmanuelle Loyer s’arrêtera sur ce qui étonne en elle l’historienne, voire ce qui déstabilise les savoirs historiens ; ce qui fait dissonance dans l’historiographie sociale, du genre, des sexualités ou autres – et qui, au fond, révèle une véritable acuité historienne.

Carole Christen interrogera la possibilité de faire une histoire des transfuges de classe – personnes ayant connu une forte mobilité sociale, souvent ascendante – à partir des récits d’Annie Ernaux. Celle-ci a ouvert la voie au discours de transfuge dans lequel la littérature et la place de l’école sont fréquemment évoquées.

Comme le montrera Jean-François Chanet, l’œuvre d'Annie Ernaux est traversée par une relation ambivalente au temps scolaire, celui des apprentissages libérateurs mais aussi des tensions avec l'éducation familiale, de la confrontation aux assignations de genre et aux représentations sociales dominantes.