• Conseillé par
    29 janvier 2011

    "Les femmes désirent ce qu’elles aiment, les hommes aiment ce qu’ils désirent", a dit Sacha Guitry. Dans La Vie est brève et le désir sans fin, Patrick Lapeyre met en scène des relations amoureuses complexes, perçues depuis un point de vue masculin. Au départ il y a Louis Blériot (oui, comme l’aviateur) : marié à Sabine, qui l’entretient carrément, il renoue avec Nora, qui l’avait quitté sans préavis deux ans plus tôt. Et oui, Nora est ainsi ; imprévisible, mystérieuse et insaississable. D’ailleurs, pendant qu’elle retrouve les bras de Louis, c’est Murphy Blomdale qui constate avec effarement que sa petite amie s’est envolée de leur appartement londonien sans explication. Mais y-a-t-il vraiment quelque chose à comprendre, dans le comportement de Nora ? D’ailleurs, elle finira par revenir, puis repartir... Elle est comme ça. Aimante, changeante...

    Le moins que l’on puisse dire, c’est que Patrick Lapeyre n’épargne pas ses héros et que, malgré la duplicité de l’un ou la faiblesse de l’autre, il nous les fait aimer. Et oui ! Ce n’est pas facile d’être un homme amoureux, en fait ! On en vient alors à plaindre Blériot, qui ment pourtant éhontément à sa femme, de devoir subir les crises de jalousie d’une Nora pas vraiment cohérente... Et Murphy, qui se fait quand même bien plumer ? Bah il est plutôt attendrissant...

    D’un sujet un peu trivial, l’adultère, ses crises et ses mensonges, Patrick Lapeyre parvient à tirer un roman touchant, au style fluide et aux scènes poétiques. Le trio infernal de base formé par Nora, Blériot et Murphy, n’est qu’un exemple de "couple" qui va de travers. Blériot et Sabine qui lui a refusé un enfant ; les parents Blériot où la mère tyrannise le père ; Léonard et Rachid... Mais on a beau savoir que ça va faire mal, on y retourne : la vie est brève, autant en profiter !


  • Conseillé par (Libraire)
    24 août 2010

    « L'amour est sans solution. »

    « Il se sent tout à coup rajeuni.
    Pendant deux ans, enfermé dans le cercle de son chagrin, il s’est méthodiquement appliqué à vieillir. Il a vécu suspendu à un fil invisible, sans relever la tête, sans se soucier de personne, occupé à ses petites affaires et à ses tracas, en renonçant à tout le reste comme s’il cherchait à s’éteindre.
    Il était d’ailleurs presque éteint quand elle a appelé. »

    A Paris, Blériot, un homme amoureux d’une femme qui arrive au rendez-vous avec deux ans de retard, à cinq heures précises. De lui, on dira qu’ « il a l’habitude de penser lentement, si lentement qu’il est en général le dernier à comprendre ce qui se passe dans sa propre vie ».
    Mais il vaudrait mieux qu’il réfléchisse tout de même vite car il est marié, et que l’adultère est une chose compliquée, qui demande de l’habileté et du calcul.

    A Londres, Murphy, un autre homme amoureux de la même femme, qui vient de le quitter. Plongé par ce départ dans un état proche de la sidération, il ne parvient pas à y croire et, déterminé, entreprend des recherches pour essayer de comprendre pourquoi elle s’est envolée en ne laissant en tout et pour tout qu’une chaussure oubliée au fond d’un placard, un foulard mauve, trois livres et quelques magazines de mode.

    De l’un à l’autre, Nora traverse la Manche comme on traverse un boulevard, une petite Anglaise étrange, imprévisible — on l’imagine avec les traits de Jean Seberg —, qui rêve de devenir comédienne et, en attendant le grand rôle, joue à faire souffrir ses deux amoureux. Sans doute ne le fait-elle pas exprès. Elle est juste « comme ça ». Elle a besoin de se sentir libre, et si elle part, c’est pour avoir le plaisir de revenir.

    Patrick Lapeyre nous raconte avec virtuosité cette histoire d’amour où tout ira mal pour tout le monde car Nora, telle une drogue forte, intoxique ceux qui passent près d’elle. Nora est inoubliable et vivre sans elle est impossible.

    Cette grande histoire d’amour complètement ratée aurait pu être d’une banalité à pleurer. Mais Patrick Lapeyre a du talent, et il parvient à un équilibre si parfait entre ironie et mélancolie qu’en refermant le livre on se rend compte qu’on n’a pas cessé de sourire aux tristes mésaventures de ses anti-héros magnifiques. Il n’y a là aucune recette, simplement de la générosité.