La peau de chagrin, Bac 2024

Honoré de Balzac

Folio

  • Conseillé par
    17 février 2010

    "Vouloir nous brûle et Pouvoir nous détruit."

    Roman d'Honoré de Balzac.

    Le récit s'ouvre sur la ruine de Raphaël de Valentin. Son dernier sou sacrifié sur une table de jeu, désargenté et solitaire, il songe à mourir, à se jeter tête première dans les eaux froides et sombres de la Seine. Il doit sa survie à un magasin de curiosités dans lequel il acquiert un antique talisman, une peau d'âne légendaire, qui est censée exaucer le moindre de ses souhaits. L'objet magique en poche, il rencontre des amis et se livre à une soirée de débauche. À son ami Émile, il raconte ses trois années de réclusion, consacrées à l'étude et à l'écriture de La Théorie de la Volonté, son chef-d'oeuvre. Il raconte aussi son amour malheureux et non payé de retour pour la froide et insensible comtesse Foedera, à laquelle il sacrifie ses maigres économies et sa santé. Désespéré par cette passion vaine, empli de haine pour cette coquette inaccessible, au terme de cette nuit décadente et vidé par sa confession, il décide de brûler son existence en caprices et excès. La vie de Valentin ne tient désormais qu'à un fil. Chaque souhait exprimé réduit l'existence du jeune homme de quelques jours, de quelques mois ou de quelques années, à mesure que la peau de chagrin rétrécit. Terrifié par le pouvoir du talisman, il tente de vivre en reclus, de se soustraire au monde pour ne plus se laisser tenter par ses attraits. Son amour pour Pauline, la fille de son ancienne logeuse devenue riche, semble lui rendre goût à l'existence, mais la peau de chagrin continue de diminuer, et avec elle les jours de Raphaël.

    La première partie du livre, où Raphaël raconte ses misérables années dans sa mansarde puis sa passion fatale pour Foedera, est insupportablement longue. La confession n'en finit pas, et on s'impatiente de découvrir le pouvoir de la peau de chagrin, de voir s'exercer son emprise sur la vie du héros. Mais quand, enfin, il se décide à l'utiliser, il conçoit rapidement le danger qu'elle représente et il n'a de cesse de vouloir le contrer. Ce qui donne un texte frustrant, qui ménage une trop grande attente pour une trop courte satisfaction.

    "Vouloir nous brûle et Pouvoir nous détruit." (p. 58), voici les sages paroles du vieux marchand, aux allures de sorcier ou de gourou oriental. Le vieux bonhomme enjoint donc à pratiquer l'ataraxie, ce qui est assez illusoire dans un siècle de décadence comme celui où vit Raphaël. J'ai lu avec ironie la description de sa vie studieuse, dans la misérable chambre d'une miteuse pension de famille. Le jeune homme se contente de quelques biscuits, de bol de lait et de la contemplation des astres éternels. Pas étonnant qu'il se lance à coeur perdu dans son amour pour Foedera, et plus tard dans une vie au train fastueux.

    Et n'est-il pas insupportable cet homme attiré uniquement par les femmes entourée de luxe? La jeune et jolie Pauline lui tend les bras depuis le début, et il s'acharne à ne voir en elle qu'une soeur. Il faut qu'elle soit devenue une riche héritière, vêtue de baptiste, les cheveux ornés de fleurs, pour qu'il lui trouve du charme. L'amour dans la pauvreté lui est inconcevable.

    Dans l'ensemble, ce roman m'a agacée. Raphaël est un pleurnicheur insupportable, incapable de savoir ce qu'il veut, et encore plus incapable d'accepter l'échec. L'attrait mystique du roman, la peau de chagrin et ses légendaires pouvoirs, sont réduits à l'état de curiosités. Flirtant avec le fantastique macabre, le texte manque de force et semble plus bouffon que terrifiant.