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    17 juillet 2014

    De ce tome, je garde en mémoire trois thèmes principaux, celui de l'amitié entre le narrateur et Robert de Saint-Loup que Marcel Proust sait parfaitement dépeindre; il est à mon avis meilleur dans la description de ces amitiés viriles que dans les amours hétérosexuelles. Bien sûr, Proust nous présente le lien qui unît les deux hommes sans aucune ambiguïté et il leur donne à l'un une maîtresse et à l'autre un attachement sentimental mais on ne peut douter que ce qui lien ces deux garçons va au delà de ça. D'ailleurs, quand Proust décrit les amours de Robert et de sa maîtresse, on a l'impresion de revivre celui de Swann pour Odette mais en plus ridicule puisque Robert s'entiche d'une prostituée dont tout le monde peut se payer les faveurs alors que Robert se ruine pour elle. Je me demande quelle vision Proust avait des femmes pour ne décrire que des hommes enamourés par des femmes qui donnent ou vendent leurs charmes à d'autres. Le narrateur, quant à lui, tombe amoureux de la duchesse de Guermantes qui s'agace de le voir constamment sur sa route. A la fin du tome, il découvrira à quel point l'esprit de cette dame ne mérite pas son amour. Le troisième thème important est celui de la déchéance de sa grand-mère qui est de plus en plus mal en point avec une scène très touchante où il la voit alors qu'elle ne l'a pas encore vu. Pour la première fois, il la sent fragile, comme une vieille femme proche de la mort. Dans ce roman, on sent à quel point l'affaire Dreyfus divisait, même si dans la société dans laquelle vit le narrateur, on était majoritairement anti-Dreyfusard. Et dans ce tome, les références anti-sémites ne m'ont pas gênée car elles sont liées à des personnages dont on sent bien que Proust se moque. J'ai beaucoup aimé comment Proust utilise le théâtre pour symboliser à la fois la mort mais aussi la double personnalité des gens. Dans la deuxième partie de ce tome, il y a aussi de très beaux moments qui concernent des thèmes très différents : la relation mère-fille à la fin de la vie de la mère, la différence entre les nobles et les riches, le passage du temps qui peut filer ou pas selon qu'on attend qu'un moment arrive ou qu'on le vive, les garçons à la recherche d'une femme fortunée mais aussi la littérature à travers Hugo, Flaubert et Balzac. Et j'ai beaucoup aimé aussi l'intrusion de mots alors nouveaux, dont les protagonistes discutent en se demandant s'ils resteront dans le vocabulaire, comme talentueux ou mentalité. C'est le tome que j'ai préféré depuis le début d'A la recherche du temps perdu.
    J'ai aimé l'interprétation de Robin Renucci. Je lui préfère André Dussolier mais je le trouve bien meilleur que Lambert Wilson.