Félicité ou… Le bonheur d’avant

… Alors la course feinte prend brusquement dans ses jambes frêles la vitesse d’un galop. Le vent qui siffle à ses oreilles la porte, la transporte, la soulève et ses pieds effleurent à peine le sol. Épuisée, elle tombe à plat ventre dans les hautes herbes. Un martèlement du sol, comme dans un rêve, se confond avec les battements de son cœur et résonne dans sa tête. C’est un orage porté par un grand vent, un pan de montagne qui déboule sur le chemin. Le bruit se rapproche. Un poids se pose sur son échine, c’est un pied lourdement chaussé. Elle comprend que les diables dont on parle au village sont en train de la voler pour l’emmener par-delà les grandes eaux. Elle est parée de la jupe en raphia et du collier de perles de la cérémonie d’excision. Son corps luit de l’huile de palme dont les femmes l’ont ointe, ses joues et son front portent le maquillage blanc des jeunes initiées.